Synopsis

Paris années 1860, M. Baudu vend du tissus dans une petite boutique. Depuis des mois il lutte pour la survie de son commerce. En effet un grand magasin s’est installé dans sa rue et juste contre son échoppe. Arrivent chez lui ses neveux Denise et Jean. Il les héberge. Denise ne veut pas être un poids financier pour le vieil homme. Elle se fait engager comme vendeuse au « Bonheur des dames » …

CRITIQUE

On peut imaginer les difficultés de réalisation de ce film qui a été tourné en pleine occupation nazie.

Le film est produit par la Continental société de production allemande qui malgré l’esprit éclairé de son directeur Alfred Greven nommé par Joseph Goebbels à ce poste, il n’en devait pas moins passer par la censure.
De plus le film subissait des restrictions sur le matériel: les décors qui parviennent malgré tout à donner une belle illusion d’opulence; et la pellicule: les scènes étaient peu refaites, il fallait tourner les scènes en une ou deux prises. Le travail se faisait de nuit. Trop dangereux le jour à cause des bombardements incessants sur Boulogne Billancourt où se trouvaient les usines de Renault principale cible de ceux-ci. Mais cela n’empêchait pas les alertes incessantes qui interrompaient le tournage.
Enfin les trois quart du petit monde qui fait le film (techniciens, figurants) crevaient de faim et vivaient d’expédients.
La vision du film de Bertrand Tavernier « Laissez-passer » qui contient une séquence du tournage de ce film met bien en exergue les difficultés du cinéma en ces temps troublés.

Donc pour un film tourné dans ces conditions c’est plutôt une grande réussite.

Si l’on retire la scène paternaliste du directeur du magasin à la fin du film juste avant la fin tragique du petit boutiquier, « Au bonheur des dames » est un vrai plaisir.
Il est étonnant d’ailleurs qu’un roman de Emile Zola ait pu être adapté à l’écran en ces temps hitlériens où le romancier français n’était pas du tout dans les petits papiers du IIIème Reich.

Bien sûr Michel Simon est grandiose et Albert Préjean est d’une ambiguïté qui oscille entre exploitation éhontée de son personnel et porte drapeau du progrès social qui souffle le chaud et le froid selon les circonstances.
Quant à Jean Tissier, si son jeu date un peu il n’en fait pas moins un homme machiavélique et l’incarnation de la face sombre du capitalisme.
Les décors sont admirables et les éclairages parfois très travaillés et parfois bâclés. Sûrement un symptôme des problèmes budgétaires.

LA SCÈNE D’ANTHOLOGIE

Le dernier face à face de Baudu et de Mouret le propriétaire du grand magasin. Baudu, anéanti, dans un ultime sursaut d’orgueil rejette le geste de charité de son adversaire. Du grand Michel Simon.

L’ANECDOTE

En 1930 Julien Duvivier avait déjà réalisé une adaptation muette du roman d’Emile Zola.

NOTE : 14/20

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